[Chasses nocturnes] [M] If time could stop

Comme tous les jeudi soir, Luca s'offrait une petite soirée de tranquillité. Il appréciait beaucoup la compagnie des siens, mais de temps en temps, il besoin d'être seul pour avoir un peu de calme. Généralement, il s'offrait une petite sortie culturelle en allant au théâtre, à l'opéra où encore à un concert. Il aimait se mêler et fréquenter toute cette population mondaine qui venait assister à ses événements. Il se sentait comme un poisson dans l'eau parmi eux. Un vrai plaisir.

Aujourd’hui, il avait choisi d'aller voir une pièce de théâtre. C’était la première représentation d’une pièce d’un jeune auteur. Même si le résumé qu’il avait pu lire sur un des tracts ne l’inspirait pas, Luca avait quand même décidé de s’y rendre. Et cela uniquement parce qu’il savait que ce soir tout le gratin y serait. Il ne pouvait pas manquer ça. En effet, le jeune dramaturge n’était autre que le fils d’un ministre, et son père avait invité tout le monde.

Le jeune homme avait payé le prix fort pour obtenir une des meilleures places qu’ils restaient au balcon car la majorité avait été réservée pour la noblesse. Mais cela n’avait pas d’importance pour lui. Il refusait de se mêler au petit peuple dans la fosse.

Pendant la première demi-heure de la pièce, Luca luttait pour rester éveiller. C’était certainement la pire des choses qu’il n’avait jamais vu. Tout était mauvais dedans. Les décors étaient mal réalisés et tenaient à peine en place. Cela n’était certainement plus qu’une question de minutes avant que l’arbre en papier mâché ne tombe sur un des acteurs. D’ailleurs ces derniers étaient tout aussi pathétiques que le décor. Comment le dramaturge avait-il pu choisir des personnes ne sachant pas jouer ? Et le scénario… c’était d’un banal. Une histoire d’amour entre un homme sans sous et une jeune et jolie femme riche appartenant à un autre monde que le sien. Au court de son existence il en avait vu des choses mauvaises, mais là, ça battait des records.

Baillant discrètement, Luca ses yeux de la scène pour les promener dans la salle. Observer les gens présent dans le théâtre l’occuperait un peu avant de l’entracte. A ce moment –là, il en profiterait pour s’éclipser pour s’enfuir lui d’ici. Très vite, son regard s’arrêta sur le balcon d’en face. Comment avait-il fait pour ne pas remarquer ce magnifique jeune homme avant ? Il était aussi beau et majestueux que les statues grecques sculptées dans le marbre. Un vrai chef d’œuvre. Il passa le reste du premier acte à le contempler oubliant tout autour de lui.

Pour une fois le dîner ne se passa pas dans le silence habituel où seuls les bruits des couverts perturbaient le calme plat. La discussion était même très animée. Tout le monde y allait de son petit commentaire, insistant bien sur la pièce de théâtre qu'ils allaient voir après le souper. D'après les rumeurs celle-ci était vraiment intéressante, sans parler de la troupe qui la jouait. Comment pouvaient-ils savoir tout ça alors qu'ils allaient à la première représentation et que les acteurs n'étaient pas connus en ville ? C'était ridicule. Bien sûr le jeune homme se passa de faire une réflexion, refusant de s'attirer les foudres de sa famille et de sa fiancée.

« Matthew », Souffla la jeune femme en se tournant justement vers le jeune homme qui n'avait pas prononcé le moindre mot depuis le début de la conversation. Il espérait pouvoir prendre son mal en patience jusqu'au départ pour le théâtre. Loupé. « Qu'en pensez-vous ? » Elle lui offrit un sourire, curieuse de connaître son avis. Au fond, Matthew était persuadé qu'elle se fichait de savoir exactement ce qu'il pensait, elle cherchait simplement à attirer son attention. « Il est préférable d'attendre la fin de la représentation pour vous répondre, ma chère. » Sa voix était parfaitement calme, un brin charmeuse, tandis qu'un fin sourire se dessinait sur ses lèvres. Il ne pouvait pas envoyer sa fiancée sur les roses, il devait prendre sur lui, même si sa manie de monopoliser son attention lui tapait de plus en plus sur le système. Par chance, elle ne chercha pas à insister et le dîner put se terminer tranquillement.

L'heure tournait et Matthew se sentait soudainement sous pression pour terminer de se préparer. Sa mère et sa fiancée semblaient impatiente d'arriver au théâtre. Son père attendait sagement dans un des fauteuils du grand salon, le journal du jour sur les genoux et un verre entre les doigts. « Matthew ! » La voix de la jeune fille fit grincer des dents le jeune noble qui terminait d'ajuster son col en rejoignant le hall de la demeure. Il ne comprenait pas pourquoi elles étaient si pressées. Ils avaient déjà leurs places et ils ne pourraient pas avoir mieux, même en arrivant les premiers. Voulaient-elles se pavaner et faire tourner les têtes des autres femmes devant leurs nouvelles robes ? « Me voilà, je suis navré de vous avoir fait attendre. » Souffla-t-il en passant aux côtés de la jolie blondinette qu'il allait épouser dans quelques temps. Il faisait toujours tout pour se montrer courtois, même si l'envie de s'enfuir le tiraillait parfois.

Sur le chemin, Matthew essaya de ne pas penser à son mariage arrangé avec Elizabeth. C'était sa meilleure amie, celle qui l'avait toujours accompagné dans son enfance. Ils en avaient fait des bêtises petits, mais elle avait aussi été là pour rendre les cours des vieux précepteurs bien moins barbants. Il l'aimait, de tout son coeur, seulement il n'arrivait pas à la voir comme une femme à marier. Elle était son amie. Il serait heureux de la voir épouser n'importe quel homme, tant qu'elle était heureuse et qu'il pouvait continuer de la voir. Il était juste pas prêt à lui offrir ce qu'elle semblait chercher désespéramment en lui. C'était sûrement pour ça qu'elle l'insupportait de plus en plus ces derniers temps. Il avait vraiment envie de lui dire de se taire, pourtant il continuait de lui sourire et de prétendre que cette union forcée lui plaisait autant qu'à elle.

Le théâtre apparu enfin dans son champ de vision et il vit l'arrivée comme une chance de fuir sa fiancée. Elle resterait à ses côtés, mais au moins pendant la représentation elle ne pourrait pas l'abreuver de paroles comme elle l'avait fait tout le long du trajet. « Allons-y, ma chère. » Gentleman, il tendit son bras à Elizabeth qui l'attrapa sans se faire prier plus longtemps. Elle n'attendait que ça, il l'avait senti, mais pour lui faire plaisir il pouvait bien faire un effort.

Son entrée dans le hall du fit impression. Il n'était pas surpris de voir les regards se tourner vers lui. Son nom était connu dans toute la ville et il savait en jouer à la perfection. Il se montrait toujours sous son meilleur jour, un sourire aux lèvres, faisant honneur à son père. Matthew avait beau critiquer vivement l'hypocrisie des nobles de son entourage, il refusait de perdre tout ce qu'il avait. Il n'était pas prêt à se faire déshériter pour fuir vers une nouvelle vie. Il préférait prendre son mal en patience et réfléchir à un moyen de se sauver sans risquer de finir à la rue sans un sous. Il n'était finalement pas mieux que tous les autres.

« Magnifique ! » S'exclama sa fiancée, visiblement ravie de l'emplacement des sièges. Matthew se contenta de lui offrir un énième sourire en guise d'aval, avant de prendre place à ses côtés. La pièce commençait tout juste, lui permettant d'éviter une nouvelle discussion des plus épuisantes. Il n'en pouvait plus de l'entendre jacasser à longueur de journée, il avait besoin d'une pause.

Il ne savait pas si c'était son humeur qui influençait ou si la pièce était vraiment mauvaise, mais son esprit n'arrivait pas à apprécier ce qu'il était en train de regard. Il commençait presque à se demander s'il n'aurait pas préféré qu'Elizabeth lui parle de la pluie et du beau temps à la place. C'était quand même fort d'en arriver là ! Tout le monde en avait dit que du bien et là, Matthew était désespéré par le décor et le jeu des acteurs des plus médiocres. C'était lamentable d'avoir à supporter un tel spectacle. Il devait lutter longuement pour éviter d'échapper le moindre bâillement. Il ne pouvait pas se permettre d'attirer l'attention sur lui. Il était important de rester l'homme parfait dont tout le monde vantait les mérites. Il ne pouvait pas se permettre le moindre écart.

Lorsque l'entracte arriva, il fut soulagé de ne plus avoir à faire semblant de passer un bon moment. Il en profita pour se lever, histoire de se dégourdir les jambes. Sa fiancée l'accompagna sans hésiter, son bras se glissant autour du sien. « Je vais aller nous chercher de quoi boire. Je reviens vite. » Elle le lâcha tout aussi rapidement qu'elle l'avait attrapé pour s'éloigner du côté de la buvette. Il s'attendait à devoir lui proposer d'y aller, question de galanterie, mais il n'était guère surpris de la voir prendre les devants. Elle avait toujours été imprévisible, et avant leurs fiançailles, il trouvait ce trait intéressant. Maintenant, ça l'agaçait presque. « Dans ce cas, je vous attends. » Il la regarda s'éloigner, attendant sagement qu'elle disparaisse avant de laisser un soupir lui échapper. Sa main glissa le long de son visage, signe de sa lassitude. Jouer la comédie était épuisant, il avait vraiment besoin d'une pause de toute urgence.

Étrangement, depuis que ses yeux étaient fixés sur cette beauté, en face de lui, le temps semblait passer plus vite. Dire qu’il comptait les secondes quelques temps auparavant en regardant cette catastrophe littéraire. Sa soirée culturelle théâtre c’était transformé en soirée culturelle œuvre d’art. Il n’avait pas perdu sa journée, et il espérait ne pas perdre sa nuit non plus. Il avait l’entracte pour séduire ce jeune noble. Même pour lui la tâche serait difficile en si peu de temps. Passer une nuit de folie en compagnie d’un autre homme ne faisait pas vraiment partie des mœurs actuelles. Il regrettait de n’avoir pas vécu à l’époque de son arrière-grand-père en Grèce. Au moins, cela aurait été facile de mettre ce canon de beauté dans son lit.

Quand l’entracte fût annoncé, Luca se précipita à l’extérieur de sa loge. L’objet de sa convoitise venait de sortir de la sienne. C’était le moment où ne jamais de pouvoir l’aborder. Il n’allait pas rater une opportunité comme ça. Vu comment il avait l’air de s’ennuyer, il risquait de s’éclipser pendant la pause. Il ne pouvait pas se permettre ça en attendant la fin de la pièce. Et puis, s’il avait arrivé assez à le séduire, peut être parviendrait-il a partir avec lui avant que le deuxième acte ne commence. Rien qu’à cette idée, un large sourire se dessina sur ses lèvres et déjà, des idées perverses se bousculaient dans sa tête. Cependant, il devait se calmer. Se montrer trop entreprenant pouvait effrayer sa proie. Il n’avait certainement pas l’habitude de se faire aborder par des hommes. Quoique, avec un tel physique, le contraire ne l’étonnerait pas. Mais il espérait être le premier homme à pouvoir lui mettre le grappin dessus.

Arrivé dans la pièce où tous les nobles étaient venue discuter, se rafraîchir ou dégourdir les jambes, le jeune dandy commença à parcourir la salle pour trouver sa distraction du soir. Peu importe s’il était accompagné ce soir, il comptait bien l’approcher.

Par chance, quand il le trouva, ce dernier était seul. Il se glisse derrière lui.

« Quelle désastre cette pièce~, vous ne trouvez pas ? » Susurra-t-il, avant de faire face au jeune homme.

Sa solitude fut de courte durée, quel dommage. Il pensait avoir un moment de paix, un instant où il pourrait arrêter de se forcer à jouer la comédie, mais c'était sans compter cet inconnu qui s'était approché dans son dos. Heureusement Matthew baissait rarement complètement sa garde, il restait toujours sur le qui-vive, ne sachant pas qui pourrait essayer de le trouver pour échanger quelques mots. C'était toujours bon pour la réputation de se rapprocher du fils Blair.

« Vu l'engouement pour cette pièce de théâtre, je m'attendais à mieux. », Souffla-t-il, refusant de se forcer à complimenter la pièce, même si un sourire se dessina sur ses lèvres. L'homme en face de lui semblait être du même avis. Matthew ne le reconnaissait pas, il n'avait pas souvenir de l'avoir déjà croisé et il doutait qu'il fasse partie de la troupe. Peut-être l'avait-il déjà vu à une soirée, mais vu le nombre d'hypocrites qui se pressaient autour de lui, le jeune noble avait tendance à rapidement oublier les visages des personnes les plus insignifiantes. Pourtant son interlocuteur avait un petit quelque chose qui le rendait intriguant. Si leurs chemins s'étaient déjà croisés, Matthew se disait qu'il s'en souviendrait forcément.

Par contre, il y avait fort à parier que l'homme le connaissait de son côté. Qui n'avait pas déjà entendu parler de Matthew Blair, le futur héritier d'une des familles les plus influentes en ville ? Il restait plus qu'à voir quelles étaient les intentions de l'homme. Peut-être n'était-il pas comme tous les autres, peut-être n'allait-il pas essayer de le baratiner pour essayer de gagner ses faveurs ? Matthew voyait déjà bon nombre de personnes l'approcher pour faire des éloges de la représentation, même s'ils avaient détesté. Au moins là, son interlocuteur ne tentait pas de cacher son ennui et cette franchise lui donnait envie de lui laisser une chance. Il espérait seulement que l'homme ne l'avait pas vu grimacer une fois ou deux pendant la pièce et qu'il n'utilisait pas ça à son avantage pour se démarquer des autres.

Une fois en face de lui, avec seulement un mètre qui les séparaient, Luca trouvait le jeune homme encore plus beau. De loin et dans la pénombre, il n’avait pas remarqué ce grain beauté au coin de l’œil qui ornait son visage. C’était tout à fait charmant. Lorsque le noble sourit, le brun sentit son cœur rater un battement. Vraiment, il était magnifique. Et en plus de ressembler à une statue grecque, il était aussi raffiné et bien élevé. Tout ce qu’il pouvait aimer chez quelqu’un. Plus les secondes défilaient, et plus il le désirait. Jamais il n’avait senti un désir aussi pressant de posséder quelqu’un. Si seulement ils n’étaient que tous les deux dans cette pièce…
Il s’était toujours promis de ne pas utiliser ses dons de vampire pour séduire ses proies quand il s’agissait d’un désir charnel. Le jeu était beaucoup trop facile sinon. Mais pour la première fois, il était prêt à rompre sa promesse si cela lui amenait dans son lit l’objet de sa convoitise.

« Pourquoi diable en faire autant pour la première pièce d’un auteur sans talent. L’argent a vraiment beaucoup de pouvoir. C’est navrant, dire qu’il y a des personnes qui ont beaucoup plus de talent qui n’auront pas cette chance. Oh, mais où avais-je la tête. J’en oublie la bonne manière. Luca Petrovitch. » Dit-il avec une voix suave sur un ton des plus courtois.

Il était curieux de découvrir le nom du jeune homme. Pour l’instant, il ne se montrait pas très bavard. Mais il espérait engager la conversation.

L’argent gouvernait ce monde. Matthew l'avait rapidement compris, baignant dans une des fortunes les plus convoitées de la ville. Il connaissait énormément de personnes qui feraient n'importe quoi pour en avoir une partie. Il ne pouvait pas nier qu'il était loin d'être prêt à renoncer à ses avantages, il appréciait beaucoup ce que son statut pouvait lui offrir. Il n'avait pas besoin de trimer pendant des années avant d'arriver à ses fins, il pouvait limite claquer des doigts et quelqu'un lui apporterait ce qu'il désirait sur un plateau d'argent. Le monde était injuste et Matthew refusait de lâcher ses privilèges, même si son ennui était de plus en plus étouffant. Il préférait se méfier de son entourage et se plaindre en silence des hypocrites qui croisaient sa route plutôt que de repartir à zéro.

« La société n'est pas prête de changer. Le pouvoir est entre les mains des riches, aucun ne le lâchera. » Dit-il sur un ton léger, comme si le sort de ces pauvres gens aux talents prometteurs lui importait guère. Ce n'était pas bien loin de la vérité, Matthew était quelqu'un qui faisait souvent passer ses intérêts avant ceux des autres. Était-ce vraiment surprenant ? Il avait été éduqué comme le digne héritier, le fils parfait sur qui son père comptait énormément pour prendre la relève. La pression familiale n'était pas toujours évidente, mais Matthew n'y prêtait plus autant attention qu'à une époque. Il s'était fait à l'idée qu'il ne pourrait pas changer son destin, pas sans en payer le prix fort.

« Matthew Blair. Enchanté. » C'était presque surprenant de devoir se présenter ainsi alors que tout le monde connaissait déjà son nom. Seulement le jeune noble ne pouvait pas nier que son interlocuteur l'intriguait. Il esquissa un sourire un peu plus franc, presque séduisant, comme pour plaire à l'homme en face de lui. Il ne savait pas vraiment ce qu'il attendait de lui, mais c'était toujours plus agréable comme compagnie que celle de sa fiancée. Elizabeth risquait d'arriver d'une minute à l'autre et de le coller, comme pour marquer son territoire. Il avait beau lui être promis, une part de lui continuait d'espérer que les fiançailles seraient annulées avant d'avoir lieu.

Matthew Blair. Ce nom lui disait quelque chose, et pour qu’un nom l’interpelle c’est qu’il l’avait certainement entendu quelque part et qu’il devenait être important. Il ne prenait la peine que de se souvenir des patronymes des personnes nobles ou qui en valait la peine selon lui, ou qu’il voyait régulièrement. Il n’avait pas envie de retenir tous les noms des personnes qu’il croisait. Il détestait l’endroit dans laquelle se trouvait sa demeure familiale. Un lieu glauque et dénué de raffinement. Les habitants n’avaient pas la moindre éducation, et ça en était navrant. C’était pour cela qu’il ne se mêlait pas au gens de son quartier, et qu’il ne savait même pas comment s’appelait leurs voisins.

Il fouilla sa mémoire pour savoir où il avait bien pu entendre ce nom. Soudain, il se souvient qu’un article qu’il avait lu quelques jours auparavant. Si ses souvenirs étaient bons, il faisait allusion à une fortune montant dans le commerce : la famille Blair. Elle possédait de nombreux terrains également. Ce jeune homme était l’héritier de cette fortune. Intéressant. Il comprenait mieux pourquoi il était aussi bien élevé et raffiné.

« Hm~ je ne savais pas que j’avais l’honneur d’avoir affaire à un membre de la famille Blair. Je vois que les rumeurs ne mentent pas. Mais ce que je ne savais pas, c’est que son héritier était quelqu’un d’aussi lucide fasse à la réalité de la société. C’est plutôt quelque chose de rare dans ce milieu. » Flatta Luca.

« Aimez-vous le théâtre ? Quand celui-ci est bien écrit évidemment, pas comme cette pièce. » Changea-t-il de conversation, à l’idée de lui proposer de partir d’ici pour aller voir quelque chose de beaucoup plus intéressant, et puis peut-être de faire quelque chose de plus excitant si tout se passait bien. Bien qu’il sente qu’il allait avoir du mal a amené le jeune héritier dans son lit ce soir.

La surprise put se lire sur son visage le temps d'une fraction de secondes. D'où venait-il pour ne pas avoir reconnu l'héritier de la famille Blair ? Matthew était persuadé que tout le monde le connaissait. Entendre son nom n'était pas bien difficile, son père voyait ses affaires s'étendre de jour en jour, les journaux en parlait régulièrement. Seulement c'était bien la première fois qu'on lui disait ça. Peut-être n'habitait-il pas dans le coin, peut-être n'avait-il pas encore eu la chance de croiser sa route, ce qui expliquerait pourquoi il ne se souvenait pas d'avoir déjà vu cet homme auparavant. Au moins, Luca semblait le connaître de nom, il n'aurait pas besoin de parler de sa famille et de l'influence qu'elle pouvait avoir dans ce monde.

« Ne nous mentons pas, beaucoup le savent, mais beaucoup se voilent la face. » Il ne fallait pas être un génie pour comprendre comment le monde marchait. Bien sûr, Matthew ne pouvait pas dire qu'il n'était pas tomber sur de nombreux sots qui pensaient que les plus pauvres méritaient leur destin. Ceux-là, le jeune noble aimerait bien les voir perdre leur fortune et essayer de la regagner. Il était persuadé qu'une fois sans sou, plus personne ne les accueillerait, qu'ils se retrouveraient abandonner par leurs amis, leur famille.

Heureusement le sujet ne s'éternisa pas là-dessus, passant à quelque chose de plus agréable. Matthew n'était pas contre se plaindre de l'hypocrisie de son entourage, mais il n'était pas certain que ce soit quelque chose à faire ici. Il y avait bien trop de chance de tomber sur quelqu'un qui pourrait l'entendre et qui risquerait de vouloir détruire sa réputation. « Bien sûr. Seulement, cela fait un moment que je n'ai pas eu la chance de voir une pièce de théâtre digne de ce nom. » Depuis combien de temps n'avait-il plus ressenti l'excitation de venir ici pour découvrir le travail d'un auteur ? Il était bien incapable de se souvenir de la dernière représentation qui avait suscité la moindre émotion chez lui. Peut-être était-ce le mariage qui l'empêchait d'apprécier des soirées comme celle-ci ? Il ne pouvait nier que cet événement commençait à prendre un peu trop de place dans sa vie. Il aimerait tellement pouvoir s'en débarrasser.

« Malheureusement les meilleurs pièces sont souvent les plus discrètes. Celle de ce soir faisait déjà parler d'elle avant même sa première représentation. » Il secoua la tête, perdant son sourire l'espace d'un instant. « Tout bonnement ridicule. Je n'ai pas apprécier le premier acte et je pense ressentir le même ennui face au deuxième. » La pièce était loin d'être finie, c'était sûrement la nouvelle la plus déprimante du jour pour le jeune noble. S'il le pouvait il prendrait ses jambes à son cou et rentrerait chez lui pour lire un livre afin d'oublier ce spectacle affligeant.

Luca avait paré ses lèvres de son plus beau sourire pour charmer le jeune homme. Cela ne faisait que quelques minutes qu’il avait engagé la conversation avec lui, mais il l’intéressait de plus en plus. D’après son expérience, la chasse s’annonçait difficile, mais elle en serait d’autant plus amusante. Et puis la récompense serait de taille. Cependant, il ne dirait pas non s’il pouvait l’obtenir dès ce soir. Il réprima au plus fond de son être ses instincts vampiriques. Pour cela, il s’enfonça les ongles de sa main droite dans sa paume. La douleur l’aidera un peu à oublier ce désir naissant.

Déjà, c’était une bonne chose. L’héritier aimait le théâtre. Cela le rendait encore plus charmant aux yeux du vampire. Et puis, s’il perdait sa trace, il savait dans quel genre d’endroit il pourrait le retrouver.

« Il vaut savoir où dénicher les trésors. C’est vrai que malheureusement, ce ne sont pas les meilleures pièces qui bénéficient des meilleures salles ou publicité. Il faut oser s’aventurer dans des quartiers un peu plus populaires pour les trouver. J’en connais une d’ailleurs, qui se joue actuellement. Je suis sûre qu’elle plairait à un amateur de théâtre et aussi cultivé que vous. » Répondit-il d’une voix suave.

Matthew ne s'aventurait jamais en dehors de sa cage dorée. Il avait bien essayé étant enfant, curieux de découvrir le monde, désireux de vivre d'aussi belles aventures que les héros de ses livres. Malheureusement vu son statut, s'il osait sortir des sentiers battus il risquait gros. Les gens le reconnaissaient rapidement et il n'osait pas imaginer si sa famille apprenait qu'il avait mis les pieds dans les quartiers pauvres de la ville pour une pièce de théâtre. La société ne voyait pas d'un bon oeil ce genre de comportements.

« Vraiment ? » Souffla Matthew, essayant en vain de cacher son intérêt, « Comment pouvez-vous affirmer que cette pièce me plaira à coup sûr ? » Il avait beau vouloir dire qu'il aimerait bien donner une chance à cette pièce de théâtre, il restait incapable de lâcher ses privilèges pour profiter de la vie. Il rêvait de liberté, mais il était le premier à refermer la porte de la cage. Il n'était pas prêt à risquer sa vie actuelle. « Ma famille était persuadée que la pièce de ce soir me plairait. Finalement, ils se sont trompés et je doute que la fin me fasse changer d'avis. » Si même ses proches n'étaient pas capables de savoir ce qui pourrait réellement lui plaire, comment un inconnu pourrait le deviner ? Pourtant le jeune noble ne pouvait pas s'empêcher de penser que sa famille ne le connaissait peut-être pas aussi bien qu'elle voulait le faire croire. Matthew leur cachait bien des choses et portait régulièrement un masque devant eux. Jamais il n'aurait osé dire ce qu'il avait dit à cet homme. Pourquoi était-ce si facile de s'ouvrir à lui ?

Luca regardait d’un air amusé le jeune noble. Comme il pouvait s’attendre, celui-ci n’avait pas immédiatement accepté sa proposition. Une telle beauté devait souvent recevoir ce genre d’invitation, et il était certainement devenu méfiant. Qu’on s’intéresse à son physique ou à son argent, il devait vraiment être sollicité. Venait d’un homme, il devait plutôt penser que le jeune homme brun en avait après son argent, et qu’il essayait de se rapprocher de lui pour être dans les petits papiers de sa famille. Si seulement Matthew pouvait s’imaginer de quelle façon il le convoitait. Les pensées et les envies qu’il avait, étaient loin d’être très catholique. Bien au contraire.

« Votre famille vous connaît-elle vraiment ? Sans vouloir vous offenser, je doute que ça soit vos parents qui vous aient élevés. Combien de nourrices se sont occupées de vous ? Donc on pourrait dire que je vous connais presque autant que votre propre famille. En vous ayant observé et discuter avec vous quelques instants, je peux affirmer que cette pièce vous passionnera bien plus que celle-ci. Déjà, n’importe qu’elle pièce ayant un scénario et des acteurs sachant retranscrire parfaitement les émotions. L’imagination est fleurissante dans les quartiers populaires. N’avez-vous jamais rêvé d’un peu d’aventure pour pimenter votre vie d’oiseau dans une cage doré ? » Répondit-il en usant de tout son charme pour essayer de le convaincre.

Au loin, une jeune fille, avec deux verres à la main, s’approcha de l’héritier. Luca l’observa quelques secondes et il reconnut la demoiselle qui se tenait à ses côtés tout à l’heure. A en juger par son physique, cette dernier n’était certainement pas sa sœur. Sa fiancée peut-être ? Si c’était le cas, une difficulté venait de s’ajouter à son jeu de séduction. Mais ça n’allait certainement pas l’arrêter.

« Pourquoi ne pas venir en juger par vous-même ? Que direz-vous de jeudi prochain, dans l’East End, au théâtre Goodman’s Field, pour voir The laying valet David Garrick ? » Susurra-t-il avant que la jeune fille ne vienne.

Comme la pièce allait bientôt commencer, il commença à regagner son balcon. Même s’il savait que le deuxième acte serait aussi ennuyeux, il avait bien l’intention d’observer Matthew, tapis dans le noir.

Sans surprise, Luca tapa dans le mille. Ce n'était pas un secret d'état, mais c'était presque déplaisant de se sentir ainsi mis à nu. Matthew avait beau penser pareil, il n'aimait vraiment pas avoir l'impression que son masque était tombé et qu'il était vulnérable face à cet homme. Il était loin de faire face à un imbécile, ce Luca savait de quoi il parlait. C'était quoi son nom déjà ? Petrovitch ? Le jeune noble n'avait pas l'impression de l'avoir déjà entendu. Bien sûr, maintenant qu'il avait fait la rencontre de cet homme il ne comptait plus l'oublier.

Matthew le laissa prendre congé pour regagner sa loge. Il le regarda s'éloigner, continuant de s'interroger sur ses intentions. En avait-il vraiment après son argent ? Il n'en était pas convaincu, pas après l'invitation que l'homme lui avait lancée. Jeudi prochain, au théâtre Goodman’s Field. Oserait-il s'y rendre ? Pourrait-il ouvrir la porte de sa cage et s'envoler l'espace d'une soirée ? Pour ça, il faudrait déjà qu'il invente une excuse pour justifier son départ du domicile familial, sauf s'il arrivait à disparaître ni vu ni connu comme quand il était enfant et qu'il en avait marre de rester enfermé.

« Vous n'avez pas trop attendu, j'espère. » La voix de sa fiancée le tira hors de ses pensées. Il esquissa un léger sourire en se tournant vers elle. Il ne se sentait plus aussi éclatant, comme si quelque chose s'était assombri en lui. Il ne pouvait pas nier que les paroles de Luca l'avait marqué. Il risquait de penser à cette invitation pendant un moment, incapable de la refuser vraiment. « Bien sûr que non, ma chère. » Il resta courtois, invitant la demoiselle à le suivre jusqu'à leurs sièges. La pièce n'allait pas tarder à reprendre et heureusement, cette fois, il n'aurait pas à supporter ça sans avoir bu. Il récupéra le verre qu'elle lui tendit et s'empressa de la remercier avant d'en boire une gorgée. Il ne pouvait pas le vider d'une traite, ce serait pas convenable de la part d'un noble comme lui, pourtant ce n'était pas l'envie qui lui manquait.

Incapable de se concentrer sur ce qui se passait sur Scène, Matthew laissa son regard se promener sur les spectateurs. Il ne fut pas vraiment surpris d'apercevoir Luca dans une loge face à la sienne. L'homme ne pouvait pas être tombé sur lui par hasard, il était trop intelligent pour oser critiquer la pièce à n'importe quel noble sans connaître avant ses réactions face au spectacle. Pourtant le jeune homme ne comprenait vraiment pas pourquoi il l'avait choisi lui ? Luca aurait pu s'intéresser à sa fiancée, elle était plus jolie, une proie presque plus facile même si elle pouvait faire preuve d'un caractère affirmé. Avait-il vraiment compris que Matthew rêvait de s'envoler loin de sa cage juste en le voyant grimacer une fois ou deux pendant la pièce ? Ou le connaissait-il depuis un moment et avait juste sauté sur l'occasion pour l'aborder ? Finalement cet homme était bien trop douteux pour que Matthew accepte réellement son invitation. C'était un piège, sans l'ombre d'un doute.

De nouveau installé dans son siège, Luca fixé le balcon d’en face pour ne pas manquer l’arrivée de sa proie. Son large sourire toujours sur ses lèvres, n’était pas prêt de s’effacer. Il ne mit que quelques minutes pour lui aussi regagner sa place avant le début du second acte. Une fois de nouveau dans son champ de vision, la vue lui parut beaucoup plus belle. Il convoitait vraiment de plus en plus ce jeune homme d’une telle beauté. C’était la première fois qu’il se sentait presser de posséder quelqu’un entre ses draps. Et pourquoi ne pas goûter un peu de son sang, rien qu’un peu. Il ne fallait pas non plus tout boire. Non, tuer les gens était quelque chose de bannit dans sa famille. Et puis cela serait un gâchis de mettre fin à une existence comme celle-là. Un sang d’une telle lignée noble ne pouvait qu’être délicieux. Le vampire soupira. Pourquoi les humains n’avaient qu’une faible espérance de vie et se fanaient si vite. Peut-être trouvait-il Matthew si beau justement parce qu’il savait que sa beauté et son charisme n’étaient qu’éphémère ?

Tapit dans l’ombre, il passa tout le reste de la pièce à observer les moindres traits du garçon. Fantasmant à la manière dont il pourrait les effleurer en les redessinant. Comment il laisserait ses doigts parcourir les courbes parfaites du jeune homme, ou encore mordre dans cette peau claire si attirante. L’objet de sa convoitise ne pouvait pas voir l’expression qu’avait prise le visage de Luca, et fort heureusement, car avec un regard qui semblait vouloir le dévorer, n’importe qui aurait paniqué et prit la fuite. Cela lui aurait gâché toutes ses chances qu’il accepte de venir au rendez-vous qu’il lui avait donné. D’ailleurs, il ne savait toujours pas si celui-ci viendrait, mais en tout cas, il savait qu’il avait réussi à capter son attention à le voir regarder dans sa direction.

Étonnant, quand on regarde quelque chose d’intéressant, le temps passe plus vite. Les minutes avaient défilées a une vitesse folle et la pièce se terminait déjà. Luca regrettait que ce navet ne dure pas plus longtemps. Il ne savait pas quand il pourrait revoir le jeune homme et il en aurait bien profité un peu plus. Il ne savait pas s’il pourrait l’apercevoir à la sortie car ils devaient emprunter des sortis différentes. Peut-être que sur le parvis du théâtre il pourrait de nouveau échanger quelques mots avec lui.

La pièce n'avait plus aucune importance. Elle ne méritait pas son attention tellement elle était médiocre. Il n'y avait rien pour rattraper le désastre. Aucun acteur ne sortait du lot, aucun décor ne méritait qu'il ne s'attarde dessus. Le deuxième acte était presque plus mauvais que le premier. Et les exclamations discrètes de sa fiancée, qui semblait se prendre à l'histoire, n'arrangeait rien à la situation. Matthew ne trouvait pas ça adorable, bien au contraire il aurait envie de sortir d'ici et d'aller prendre l'air pour ne plus les entendre. Heureusement son éducation lui donnait la force de prendre sur lui.

Plutôt que de s'acharner à suivre ce désastre, le jeune noble continua de fixer l'homme en face de sa loge. Il repensait à ses paroles, à l'invitation qu'il lui avait glissée à l'oreille avant de disparaître. Il avait beau trouver ça louche, il ne pouvait pas oublier aussi facilement cet échange. Il sentait cette maudite curiosité le titiller, lui rappeler cette soif de liberté. Il mourrait d'envie de vivre une aventure, une vraie. Seulement, il ne voulait pas perdre son rang et ses privilèges. Il était coincé entre deux chaises. Allait-il choisir sa vie monotone, mais confortable, ou allait-il oser tenter de tout risquer pour ressentir autre chose que de l'ennui pour une fois dans sa vie ?

La pièce se termina enfin, laissant Matthew encore plus perdu qu'il ne l'était avant de s'installer dans sa loge. Il avait toujours eu envie de bouleverser son quotidien et ce Luca lui offrait une chance de le faire. L'envie de céder était très forte, mais il était encore persuadé qu'il finirait par se faire une raison de peur de tout gâcher et de se retrouver sans rien. Il avait jusqu'à jeudi pour se décider, pour trouver une tactique pour éviter de se faire prendre.

Sur le chemin de la sortie, le jeune noble écoutait vaguement les compliments d'Elizabeth sur la pièce. Sa mère semblait aussi avoir apprécié le spectacle. Son père restait un peu plus vague, comme s'il s'était autant ennuyé que son fils. Matthew fit quand même l'effort d'hocher la tête pour approuver les paroles de sa fiancée, évitant ainsi le conflit diplomatique que sa critique aurait pu provoquer. Il n'était pas d'humeur pour argumenter avec sa famille. Pas ce soir. Il faillit même par être tenté à l'idée d'aller rejoindre Luca pour fuir et éviter une énième soirée de l'enfer. Seulement lorsqu'il croisa le regard de l'homme à travers la foule, il sentit qu'il n'était pas prêt, que ce n'était pas le moment et que le piège était bien trop évident. Il entraîna donc sa fiancée dehors pour rejoindre la voiture. Il était hors de question qu'Elizabeth rencontre Luca, il ne voulait pas mêler la jeune fille à cette histoire.

Ce n'est qu'une fois dehors que Matthew se détendit. Il ne savait pas pourquoi cet homme arrivait à lui faire perdre son calme, mais quelque chose lui disait que c'était la raison parfaite pour refuser son invitation. Il ne pouvait pas laisser Luca le manipuler, qui sait après quoi il en avait après en essayant de s'approcher de lui. Pourtant il lui restait deux jours pour se décider et ces deux jours allaient être très longs si le jeune homme ne pouvait pas oublier la proposition de Luca.

Devant l’entrée du théâtre, Luca attendant. Il scrutait la foule dans l’espoir d’apercevoir de nouveau le jeune homme. Malheureusement, au fur et à mesure que celle-ci s’éclaircissait, ses espoirs s’amenuisaient. Maintenant qu’il y avait moins de monde présent, il pouvait distinguait les différentes odeurs. Mais impossible de trouver le délicat parfum raffiné de sa proie. Il devait se rendre à l’évident, Matthew avait filé. Un sentiment de frustration et de déception l’envahit ainsi qu’une touche de mécontentement. Il savait que l’héritier n’allait pas être facile à séduire, mais avoir l’évidence juste en face de lui ne lui plaisait guère. Il aurait ne pas passer la nuit seul ce soir. Surtout après voir fantasmé pendant le reste de la pièce.

Dépité, il quitta enfin les lieux mais pour rentrer chez lui. Non, il était bien trop frustré pour retrouver la froideur de ses draps après une telle soirée. C’était toujours plus agréable de serrer quelqu’un contre soi, surtout en ayant rêvé de ça pendant un moment. Il devait évacuer toute cette frustration. Pour cela, il s’arrêta dans un bar en chemin. L’endroit était loin d’être un lieu raffiné comme il avait l’habitude de fréquenter, mais il savait qu’ici il trouverait de quoi se satisfaire. C’était là qu’il venait pour s’amuser et se détendre. Il pouvait aisément séduire une jeune fille facile. D’ailleurs, il avait quelque que habituées. Au moins, il ne perdrait pas de temps avec la séduction, elles étaient toutes déjà sous son charme. Il pourrait directement passer à l’étape supérieure.

Dès qu’il franchit le pas de la porte, une jeune fille, en tenue assez légère, du nom de Camille lui sauta au cou.

« Luca~, ça fait longtemps qu’on ne t’avait pas vu ici. Tu m’as manquée. Je m’ennuie sans toi. » S’exclama-t-elle tout en frottant son décolleté contre le bras du vampire.

Une chose était sûr, il n’allait pas mettre longtemps avant d’obtenir ce qu’il était venu chercher ici. Il n’était pas d’humeur ce soir à être romantique après s’être pris un râteau comme il le considérait. Camille était un peu trop vulgaire à son goût mais son corps était de plus parfait. Pour ce soir, elle serait parfaite pour le satisfaire. Luca ne perdit pas de temps et prit la peine d’échanger seulement des banalités pendant un quart d’heure, avant d’entraîner le jeune fille dans un endroit à l’étage plus calme et à l’abri des regards indiscret, afin de se satisfaire. Et pendant toute la nuit, de manière passionnée, il honora la demoiselle. Avant que le jour ne se lève, il quitta la chambre en laissant Camille nue, encore endormit. Cette nuit lui avait fait presque oublier le jeune homme. Cependant, en déambulant dans les rues, le souvenir de son odeur et son envie de le posséder revinrent très vite. Ces deux jours allaient être long…

Il les passa enfermer dans sa chambre a écrit. Depuis quelque temps, il avait débuté la rédaction d’un nouveau roman, mais ses pensées étaient ailleurs et l’empêchait d’écrire. Il passait son temps à déchirer ce qu’il venait de rédiger et comptait les heures qui les séparaient de son rendez-vous. Reverrait-il le jeune homme.

Le jour arriva enfin. Luca passa un certain temps à se préparé et parti en avance pour être sûr de ne pas le rater. Et une fois du lieu de rendez-vous, il attendit.

Le jeune homme, impatient, ne cessait de jouer avec sa montre à gousset. Il l’ouvrait et la fermait sans vraiment regardait l’heure. De temps à autre, il fixait la trotteuse qui se baladait sur le cadrant. Il savait très bien qu’il était arrivé en avance, mais il ne pouvait pas s’empêcher d’espérer que sa proie ait hâte aussi que ce rendez-vous ait lieu et par conséquence arrive plus tôt. Mais il ne devait pas prendre ses rêves pour la réalité. Vu la réaction de l’héritier la dernière fois, son charme n’avait pas vraiment au l’air d’opérer il n’avait plus qu’à croiser les doigts qu’à défaut de ça il ait réussi à éveiller sa curiosité et son envie de s’évader de sa cage doré. Luca soupira légèrement. Le challenge avait de bon côté, cela pimentait un peu la vie, mais il y en avait aussi de mauvais côté. En effet, il avait réalisé qu’il désirait le jeune noble plus qu’il ne l’avait imaginé. Sûrement parce qu’il n’avait pas réussi à le mettre dans son lit le premier soir.

Plus l’heure approchait, et plus une boule d’angoisse se formait au creux de son ventre. Le vampire commençait déjà à imaginer par quel autre moyen il pourrait le revoir. Mais soudain, alors qu’il réfléchissait, ses sens se mirent en éveil. Un merveilleux parfum familier lui parvint aux narines et un large sourire se figea sur son visage. Il était là. Aussitôt il scruta la foule à la recherche d’une silhouette connu. Mais rien. Il balaya une nouvelle fois les gens du regard avant de s’attarder une un jeune homme aux cheveux ébène s’approcher du théâtre. Pas de doute c’était lui. Luca laissa échapper un petit rire. Ce déguisement lui allait comme un gant. Puis, il se mélangea à la foule discrètement pour approcher sa proie par derrière.

« Ravie que vous soyez venu. » Souffla-t-il une fois arrivé à sa hauteur.

Revoir ce visage et sentir de nouveau ce délicieux parfum le mettaient dans une humeur des plus joyeux. Il était venu. Luca reprit un peu confiance en plus et en son don de charmeur. Ce jeune homme qui lui avait pourtant résisté deux jours auparavant était finalement devant lui. Cependant, il ne devait pas trop se réjouir. La partie ne faisait que commençait, et le plus dur restait à venir. Car il avait réussi à attiser sa curiosité mais pas encore son envie de venir le voir lui. Cela allait être ce soir que tout se jouer. Il devrait sortir ses atouts de séducteur sans pour autant en faire trop. En effet, si ses intentions étaient trop claires, nul doute que le jeune noble fuirait en s’apercevant de son but. Non, il devait la jouer finement et provoquer le même désir qu’il ressente chez Matthew.

« Pourquoi ce déguisement ? Ne vous inquiétez pas, si j’avais quelqu’un s’en prend à vous, je saurais vous défendre. » Plaisanta-t-il, puis il reprit un ton un peu plus sérieux et doucereux.

« Que diriez-vous d’aller dans un endroit un peu plus confortable ? » Dit-il en sortant deux places de théâtre qu’il avait acheté préalablement.

« Vous allez voir, ce théâtre est une petite merveille. On ne soupçonnerait pas qu’il existe une telle chose ici. » Ajouta-t-il avant de l’inviter à le suivre pour rentrer à l’intérieur du bâtiment.

Devant l’entrée, Luca présenta les deux tickets à une des jeunes filles présentes qui accompagnés les spectateurs jusqu’à leur place. Celle-ci les lu avant de les invités à la suivre. Le vestibule de ce théâtre était plutôt modeste. Aucunes décorations n’étaient présentes, et il était plutôt assez sombre. Ils traversèrent un long couloir avant d’arriver aux vestiaires. Il avait beau avoir foulé plusieurs fois le sol de ce couloir, cette traversée semblait à Luca toujours aussi longue. Il se demandait pourquoi l’architecte avait fait un tel corridor. C’était une perte d’espace. Peut-être était-ce une manière de plonger le futur spectateur dans une ambiance particulière. Quelle sorte d’ambiance il ne savait pas, mais c’était toujours un passage ennuyeux pour lui. Et le lourd silence qui s’était installé puis qu’ils avaient pénétrés à l’intérieur accentuait ça.
Aux vestiaires, le vampire se débarrassa de son manteau et le tendit à une demoiselle qui se trouvait derrière un comptoir.

« Vous permette ? » Dit-il avait d’enlever le manteau de Matthew, tel un gentleman.

Après avoir récupérer le deuxième manteau, la jeune fille les rangea sur un cintre et donna un petit ticket portant le numéro 22, et ils reprirent leur marche en direction de leur place. Ils durent monter un escalier plutôt étroit dont le plancher grinçait sévèrement avant d’arriver à leur loge privée. Luca, en homme galant, glissa dans la main de l’ouvreuse une pièce et la remercia en susurrant quelques mots à son oreille. Cette dernière, rougit légèrement et, gênée, balbutia deux-trois mots pour leur souhaiter un agréable spectacle avant de s’enfuir de la loge. Ils étaient à présent enfin seuls. Rien qu’à l’idée de se retrouver assit à côté de Matthew l’excitait. Cependant, il ne devait rien laisser paraître. Pour cela, il devait se contrôler.

« Alors ? Comment trouvez-vous les lieux ? » Demanda-t-il en s’installant sur un des fauteuils.

Luca avait choisi les meilleures places. Elles étaient évidemment plus chères, mais pour séduire le jeune noble, il était prêt à y mettre les moyens. C’était la meilleure vue qu’on pouvait avoir sur la scène. La distance était raisonnable, et permettait de voir tous les petits détails. Placés là où ils étaient, rien ne pourrait leur échapper. Bien que pour l’instant, les seules choses que pouvaient voir les deux jeunes hommes, c’étaient les broderies d’or finement réalisées du rideau en velours couleur rubis. Ils avaient également une vue sur l’orchestre qui se trouvait à un niveau inférieur devant la scène. Le reste de la salle était orné de magnifiques statues, comme on pouvait trouver dans les théâtres italiens. Ce lieu était un véritable petit joyau. Une véritable réplique des plus magnifiques théâtres italiens.

Correct si on oubliait le reste du bâtiment? C’est tout ce qu’il avait trouvé à dire pour commenter ce splendide décor ? Même dans les plus célèbres théâtres, il était difficile de trouver des sculptures aussi raffinées. Cependant, à ce commentaire, Luca lassa échapper un petit rire. Nul doute qu’il cachait réellement ses vraies impressions. Après tout, c’était normal de se retenir pour un noble. Il ne s’attendait pas non plus à ce qu’il exclame bruyamment son enthousiasme. Cet héritier était plus intéressant qu’il ne le pensait. Il allait certainement passer du bon temps en sa compagnie à essayer de le séduire avant d’arriver à son objectif. D’ailleurs, il comptait bien l’impressionner ce soir. La beauté du théâtre n’était que l’amuse-gueule.

« La pièce est à la hauteur de ce théâtre. » Se contenta-t-il de dire en souriant.

Soudain, on frappa timidement à la porte. Le vampire se leva pour aller ouvrir. La jeune fille à qui il avait glissé quelques mots n’avait pas mis longtemps avant de lui apporter ce qu’il lui avait demandé. Il l’invita a entré dans la loge pour qu’elle dépose le sceau remplit de glace qui contenait une bouteille de champagne, ainsi que deux flûtes. Puis, il la raccompagna à la sortie, où il lui glissa de nouveau quelques mots à l’oreille. Il lui effleura légèrement le visage en lui remettant une mèche de cheveux derrière l’oreille en prétexte qu’elle avait une petite poussière sur celle-ci. La demoiselle devint rouge pivoine et s’éclipsa rapidement après souhaiter une bonne soirée à ses deux jeunes hommes.

Un sourire béat sur les lèvres, le vampire retourna vers sa proie. Tel un expert, il déboucha la bouteille de champagne et remplit un verre.

« Vous prendrez bien une coupe de champagne ? » Dit-il en tentant celle-ci à Matthew.

.